En 2007, se sont achevés les travaux de réhabilitation et d’embellissement de Dardennes (voirie, place Meiffret, lavoir et création d’une fontaine). La place dévolue à la fontaine est protégée des voitures qui pourraient la prendre pour une annexe du parking qui lui fait face par une série de cubes de pierres alignés le long du trottoir. Entre eux et devant la fontaine, ont été scellées sur un socle carré (45 cm de côté sur 6 d’épaisseur) deux bornes en forme de troncs de cônes (circonférence de la base 142 cm et 130 celle du sommet) ; le sommet a la forme d’une calotte légèrement aplatie; elle sont hautes de 86 cm.. À 30 cm du pied, elles sont gravées d’une croix grecque entourée d’un cercle d’un diamètre égal à la largeur de la croix; le diamètre extérieur du cercle est de 27 cm pour 24 à l’intérieur. Le graveur a creusé un sillon en V de 1 cm de profondeur et de 2,5 de largeur pour le cercle et la croix. Taillées dans un bloc de calcaire, elles offrent une surface granuleuse. La pierre de l’une est plus claire que celle de l’autre rongée par le lichen.
Un article journalistique (le nom du périodique n’a pas été relevé sur la photocopie) du 5 juin 1981, signé Jean Albertini, présente ces bornes qui, fort heureusement, malgré l’urbanisation locale ont pu être sauvegardées. Mais ce témoin de notre patrimoine historique garde son mystère. À quoi servaient ces bornes ? Qui les a gravées? Que signifie ce signe ?
Monsieur Jean Albertini, témoigne de l’inquiétude manifestée par un de ses correspondants, monsieur Hubert Valentin, habitant de Dardennes, quant au risque de destruction d’un site archéologique.
«Il s’agit, nous a précisé M. Valentin, d’un terrain qui doit faire l’objet d’une prochaine opération immobilière. Sur cette ancienne oliveraie, se trouvent des bornes aux armes de la ville de Toulon que d’aucuns prétendent même être des bornes de l’Ordre de Malte. Ce qui n’est pas impossible, mais non prouvé. À leur côté gît, enfoncée dans le sol, une borne dont le sommet est visible. Elle paraît beaucoup plus ancienne et n’a jamais été dégagée. Ce terrain a toujours été l’objet de curieuses trouvailles dont des monnaies, des poteries et des morceaux de couvercle de sarcophages.»
Ce terrain est situé en bordure du Las et jouxte le château de Dardennes, précise l’auteur de l’article. Aujourd’hui, ce terrain est occupé par le lotissement «les Oliviers».
Monsieur Pierre Trofimoff, qui a mené de nombreuses recherches pour parfaire l’histoire du Revest, a dit à monsieur Albertini qu’il connaissait ces bornes. Et il ajoute:
«À côté, se trouvait autrefois une maison qu’on appelait la Gardanne qui fut jadis propriété de M. d’Artigue, seigneur de La Garde. Dans cette maison demeuraient les jeunes femmes dans l’attente d’un heureux événement et que les chevaliers de Malte ne pouvaient épouser».
Monsieur Trofimoff affirme que les chevaliers de cet ordre étaient implantés dans la région. D’ailleurs, ajoute-t-il, il est prouvé que la famille de Thomas, qui habitait La Garde, La Valette et Dardennes, a donné cinquante chevaliers de l’ordre de Malte. Et dans les archives du château de Dardennes, on a trouvé une lettre du commandant Bourgarel, écrite au siècle dernier (XIXe), et dans laquelle il fait allusion à la tombe d’un commandeur qui se trouverait hors des murs d’enceinte du château, probablement en bordure d’un chemin qui s’appelait autrefois «chemin de Jésus-Christ» et qui était l’ancienne route royale reliant Toulon au Revest (c’est-à-dire, aujourd’hui sur la commune du Revest, le chemin du château et la route du Val d’Ardène).
Quoique le territoire du Revest ait appartenu à Toulon, pourquoi ces bornes furent-elles plantées derrière le château de Dardennes telles que nous les présente la photo ci-jointe? Qui dit bornage dit limite. Les termes ou bornes marquant les limites du territoire de Toulon ne sont pas marqués du signe des bornes trouvées à Dardennes. Ainsi, celle qui est exposée à Ollioules, près de l’église, ou celle qui est gravée au pied de la falaise rocheuse que suit la route stratégique du Bau de Quatro Aures à partir du pont du vallon de la grille. Il semblerait plutôt qu’elles marquent l’entrée d’un enclos où aurait été inhumé le commandeur cité par monsieur Bourgarel. La croix ? Celle de l’ordre de Malte simplifiée, insérée dans un cercle, symbole de paix ? Le mystère subsiste. Il est heureux que ces témoins du passé aient été sauvegardés et qu’ils aient trouvé une nouvelle place au cœur du hameau Dardennes.
Texte de René Vernet de 2008 paru dans le bulletin 53 des Amis du Vieux Revest
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