Le promeneur curieux ne manquera d’être surpris par cette colonne blanche (altitude 550 m) dressée en contrebas de la route stratégique D662 qui relie le col du Corps de Garde et le sommet du mont Caume. Que vous soyez randonneur ayant emprunté le tracé vert de Malvallon ou le jaune de Capelude, ou que vous ayez désiré atteindre la crête par la route, vous arriverez dans un virage très pincé, à l’aire des parapentes. Tournez votre regard vers l’aval de la route. À quelques cent mètres de là, après un petit thalweg, elle est là, bien visible depuis deux ans, maintenant,dégagée de sa gangue de maquis lors du profond débroussaillement des abords de la route.
Par le talus, il est facile d’y accéder en quelques pas sur de petits blocs de rocher empilés mais stables. La colonne, qui semble cassée, repose sur trois assises parallélépipèdes de base carrée, la plus grande servant de socle à l’ensemble que le temps a patiné. C’est un monument funéraire ; la colonne, tronquée par le marbrier, symbolise l’élan de vie brisé. C’est en effet non pas une vie mais trois jeunes vies qui disparurent à cet endroit précis, dans l’après-midi du 23 août 1906, lors de la lutte acharnée des soldats du 111ème régiment de ligne, venus de Toulon, contre l’incendie qui ravageait le mont Caume depuis la veille et menaçait le Revest. Les soldats furent obligés de battre en retraite précipitamment, poursuivis par les flammes ; asphyxiés par la fumée, trois des leurs furent happés par l’incendie ; le journal de l’époque, relatant les faits, a décrit avec précision l’état dans lequel furent retrouvés les trois hommes.Ce monument commémoratif a été érigé sous l’égide de l’association patriotique « Le Souvenir Français » cependant que la municipalité du Revest avait décidé dans sa séance du 6 septembre 1906 « l’érection au chemin du mont Caume ou sur une place publique du Revest d’une pierre tumulaire. » Ce monument portant sur une plaque les noms des trois soldats victimes de leur devoir fut inaugurée sur la place du Coudon, actuellement place du général Leclerc, le 25 août 1907 ; le 15 décembre 1987, la municipalité a fait ajouter la longue liste des noms des sapeurs-pompiers du département morts en combattant le feu ou en service commandé. Pour honorer la mémoire des trois combattants morts en 1906 sur les flancs du Caume, le Souvenir Français fît placer une stèle sur les lieux mêmes de l’accident. Cette pierre a été réalisée par le Génie Militaire sous la direction de S. Broquier, Officier d’Administration du Génie, ce que nous révèle l’inscription gravée au bas du socle inférieur, face nord (S. BROQUIER, OFFR. D’AD2 … DU GÉNIE); ce qui est gravé après 2 est illisible ; est-ce « classe » ? D’où « officier d’administration de 2ème classe » ? Sur la face sud du socle intermédiaire, la dédicace funéraire a été gravée en lettres capitales et en ces termes :
LE SOUVENIR FRANÇAIS
Á LA MÉMOIRE DE
DAVAYAT ANTOINE
ROUGON EUGÈNE
GABRIEL APPOLINAIRE
SOLDATS AU IIIE DE LIGNE
MORTS EN CE LIEU VICTIMES DU DEVOIR
DANS L’INCENDIE DU 23 AOÛT 1906
Les jeunes hommes, âgés d’une vingtaine d’années, étaient de la région :
- Davayat Antoine, soldat de 2ème classe, né le 15 août 1883 à Aulnat (Puy de Dôme) ; habitait Ollioules.
- Gabriel Apollinaire-Gustave, soldat de 2ème classe, né le 24 août 1884 à Gémenos.
- Rougon Eugène-Marie-Rémy, soldat de 2ème classe, né le 1er octobre 1882 à Ollioules ; habitait la Seyne-sur-Mer.
Passant, souviens-toi
Source : Roland Vernet - Bulletin 33 sept 2002 Amis Vieux Revest