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Martin du Revest
Haut et fier perché sur un piton, à une dizaine de kilomètres de Toulon, Le Revest est un de ces villages varois qui s’enorgueillit de son provençalisme. Avec une trentaine de siècles d’histoire et de beaux vestiges médiévaux, ce gros bourg de trois cents habitants vit resserré autour de sa place, de son église et de ses traditions.
Joseph Martin y tient la vedette depuis les récents événements qui ont semé l’émoi au village. Joseph Martin pour l’état civil, Jojo pour les villageois, est né au Revest, il y a toujours vécu, il y mourra sans doute. Rond, le teint cuivré, un béret vissé sur la tête, l’œil malicieux et le verbe haut placé, voilà longtemps que chacun s’est habitué à sa silhouette alourdie par un large pantalon soutenu par une paire de bretelles croisées sur le ventre…
S’exprimant par bribes et onomatopées, Joseph Martin est, sans conteste, le plus calme et le plus affable des Revestois. Quand il n’est pas dans la colline à ramasser du bois ou à cueillir des fleurs et des plantes sauvages il s’enferme chez lui où, entre des repas frugaux, il fait sécher ses « herbes » dont tout le village profite en infusion, onguents ou décoction.
Joseph aime les bêtes : il a six chats auxquels il a coupé la queue quand ils étaient petits. « Ça les protège contre les vers.» Amoureux de couleurs, il aime à s’entourer d’une multitude d’objets aussi rutilants qu’inutiles : des brocs, des bassines qu’il achète par demi-douzaines dès qu’il touche sa pension d’invalidité. Il aime coudre sur ses vêtements de gros boutons jaunes, bleus ou rouges ...
Autant de fantaisies qui font sourire les gens du village, et certains aimeraient avoir l’insouciance rêveuse du « ravi ».
Mais voilà … En mai 1984, la mère de Joseph meurt, et la maison où ils vivaient tous les deux revient à un maçon qui avait accepté d’y effectuer des travaux pour en devenir propriétaire à la mort de Mme Martin.
Désormais, Joseph n’a plus de toit. La municipalité s’en émeut, elle lui prête le local du syndicat d’initiative. Elle lui fait porter des repas chauds. Mais ça ne peut être qu’une solution d’attente. Le maire, le docteur Charles Vidal, préfère demander au tribunal une mise sous tutelle. Un juge est nommé et saisit la gestion des biens de l’hôpital psychiatrique de Pierrefeu (Var).
Le médecin-chef de l’établissement accueillant également des personnes âgées pense que la meilleure solution est d’hospitaliser Joseph pour une période d’observation précédant une orientation future.
Il finira sa vie avec des aliénés ou dans un hospice.
Il a pleuré à chaudes larmes en sanglotant : « Jojo pas fou … Jojo pas vieux ! »
La mémoire du village
Dès le lendemain le village s’est mobilisé et a fait circuler une pétition pour s’opposer à la mesure administrative. Quelques-uns n’étaient pas favorables et ont refusé de signer. « Seul, il ne pourra pas vivre en sécurité. Il ne fera que des bêtises. Il a besoin d’être assisté en permanence… » Pour la majorité des Revestois, la solution devait passer par le village. L’administration a accepté de faire machine en arrière et de confier la tutelle à un couple qui aménage actuellement une pièce dans laquelle Joseph pourra vivre.
Satisfait de cette solution, le maire reste cependant circonspect… « C’est tout de même une grosse charge. L’autre jour, Joseph a été marqué par une séquence d’orage à la télévision. Quand le film a été terminé, il a voulu refaire la tempête et il a versé un grand seau d’eau sur le récepteur ! » Chacun est conscient des imprévus. « C’est un enfant ; il a même ses caprices et ses humeurs mais il n’est jamais violent ni agressif » témoigne Mme Jacqueline Aude qui, comme tant d’autres, fait appel à Joseph quand il s’agit de dater un événement du village : une mort, un mariage, une naissance.
Joseph est la « mémoire » du Revest. Il sait tout, à quelques jours près, sur la vie écoulée ici, au cours des cinquante dernières années. Parfois même au-delà. Il connaît chacun, surveille les plus petits, alerte les plus grands. Quand un incident mineur vient troubler la sérénité du village, Joseph sert souvent de bouc émissaire. Bris de glace ou courrier disparu… Joseph se prête à l’accusation avant de se rétracter. Toujours le même rituel.
« Ça nous porterait malheur de le faire partir », affirme une vieille femme. Les autres autour sourient mais n’en pensent pas moins.
Lui ne dit rien ou presque. Il a repris le chemin de la colline et, de temps à autre, il se rend au cimetière pour répartir plus équitablement les fleurs.
Source : Journal Le Monde, article de José Lenzini, Février 1985
Un autre texte sur Jojo, celui de Claude Chesnaud, écrit en 2005, paru dans le recueil sur la Ripelle.
Joseph Martin et sa restanque à la Ripelle
Joseph Martin (dit Jojo Cacao) a toujours vécu au Revest Les Eaux. Il est simplet et n’a jamais fait de mal à personne. Malgré son handicap, il a suffisamment de mémoire afin de chercher et de trouver de nombreuses plantes et fleurs qu’il fait sécher et qu’il infuse. Il remplit aussi ses musettes de champignons et de bois mort. Jojo est content lorsqu’il peut donner (parfois contre une modeste pièce) ce que nos collines lui offrent. Il vit avec sa mère qui habite une petite maison, rue Gabriel Péri. Elle dispose aussi d’une petite restanque à la Ripelle : c’est là qu’ils passent une partie de leur temps lors des beaux jours d’hiver car la planche est très ensoleillée. Ils se sont aménagés à ciel ouvert, avec quelques pierres sèches, un foyer afin de faire cuire les repas du midi. Bien sûr, ils viennent du Revest à pied et remontent le soir à pied. Jojo et sa mère vivent modestement, heureux et tranquilles.
Mais en mai 1984, Valentine Rebuffat épouse Martin, la mère de Jojo, meurt. Une mise sous tutelle administrative est décidée et à la veille de Noël 1984 Jojo va être interné à l’asile psychiatrique. A 54 ans, Jojo enfermé à l’asile loin de ses plantes sauvages, ses fleurs, ses champignons et sa restanque de la Ripelle ? Le Village refuse le fait administratif et réagit par une pétition signée par 250 habitants sur les 300. La pression populaire impose une marche arrière à l’administration qui avait considéré qu’il ne fallait pas laisser Jojo livré à lui-même. Un jeune couple lui offre l’asile au Village. Mais sans sa mère, Jojo ne retournera plus sur la restanque de la Ripelle.
Puis la mairie lui trouve un logement et une aide à domicile : Jojo peut continuer à promener dans les rues de notre Village et ses collines proches.
En 1987, la D.D.A.S.S. remarque que Joseph Martin lui coûte trop cher : 700 francs de déficit par mois et propose l’abandon du maintien à domicile trop onéreux. Le maire du Revest les Eaux, M. Vidal Charles, soutenu par son conseil municipal, décide de réduire ce déficit en abaissant le loyer du logement occupé par Jojo par l’augmentation de la subvention attribuée par la mairie qui passe de 4000 francs à 6000 francs par an. La D.D.A.S.S. accepte alors d’ajouter le complément : Jojo reste au Pays.
Jojo est aimé de tous, mais cela ne suffit pas à masquer les effets du temps. Nous sommes en 2003, Jojo a 73 ans. D’autorité Jojo est conduit dans la maison de retraite « des quatre saisons » aux Routes. Le climat passionnel embrase à nouveau le Village. Les avis sont contradictoires. Ses médecins traitants déconseillent ce placement qui ne pourrait qu’aggraver sa santé. D’autres, ayant remarqué que Jojo se déplace de moins en moins vite et de moins en moins loin, sont favorables à un encadrement médical permanent. Une association de « Soutien à Jojo », sous la présidence d’Anne Kro Ovrebo, fait signer une pétition afin d’obtenir son maintien au Village : il faut trouver un budget pour assurer la surveillance de nuit puisque la mairie propose de prendre à sa charge les repas et le logement, et la D.D.A.S.S. la surveillance de jour. Mais devant l’impossibilité d’atteindre un tel objectif, l’association choisit la solution d’intelligence : Jojo reste dans la maison de retraite des Routes et 3 fois par semaine les membres de l’association vont chercher Jojo afin de le ramener au Village où il retrouve ceux qu’il a toujours connu.
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- Saturday 4 March 2017
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